Un petit noir bien serré s'il vous plait !

Philippe a à peine 18 ans, il traîne sa jeunesse désespérée dans une cité grise et sale. Il n'a pas d'horizon, à part son pote Bruno qui lui, a eu la chance de partir en voyage et qui conte à qui veut l'entendre ses aventures exotiques et ses rêves. 

 Nathalie Sauvagnac maîtrise à la perfection les codes du roman noir. Son texte chante la misère sociale. Il y a des fulgurances qui m'ont bouleversée . Elle raconte une vérité sociale, politique, sociologique. 

"Les yeux fumés", c'est ça :

"C'est quand les gens ne sont plus là qu'on se rend compte qu'ils remplissent un vide; moi je ne pense pas que mon vide soit bien profond. 

Parfois je me demande si je ne prends pas la place de quelqu'un de plus valable que moi. C'est vrai qu'il y a des tas de mecs qui auraient pu entrer dans mes chaussons à ma naissance et qui aurait fait quelque chose de cette vie que je gaspille "

Vous savez ce qu'il vous reste à faire ….

Etre mère célibataire à l'ère Meetoo : la révolution de Samira El Ayachi.

Nancy Huston nous prévenait sur le fameux bandeau rouge que le livre que nous nous apprêtions à lire était " Puissant, bouleversant et drôle!" J'ai beaucoup d'admiration pour Nancy Huston mais je me méfie des bandeaux rouges ! Et j'avoue que là, je ne peux que m'incliner devant les adjectifs sélectionnés.

Samira El Ayachi nous donne le mode d'emploi de la vie des mamans solos dans une époque où le patriarcat a encore de beaux restes. Avec sensibilité, sans mièvrerie, elle nous raconte l'abandon, la solitude, les réveils nocturnes pour calmer, serrer, nourrir l'enfant abandonné aussi mais surtout la force extraordinaire des femmes à rester debout pour continuer à avancer . 

Une ode magistrale à la femme, à la mère , une ode à la vie tout simplement. 

Pour l’instant , les romans à ne pas manquer .

Madame Jeanne Benameur

Nous sommes en 1910 et un bateau arrive sur Ellis Island. Un père et sa fille laissent derrière eux une Italie aimée. Ils ne partent pas pour fuir la misère, ils veulent juste vivre aux Etats-Unis un nouveau départ.

" Ceux qui partent " , c'est la puissance des mots sur un sujet travaillé mille fois en littérature. Jeanne Benameur nous rappelle l'essentiel : l'amour n'a aucune frontière. Sans mièvrerie, avec beaucoup de sensualité et à travers l'histoire des corps, de l'art et de la liberté, voilà un roman qui devrait rapidement être sur votre petite pile. 

Tous pour Toussaint !!!

La rentrée littéraire bat son plein. Les prétendants pour des prix prestigieux se ruent chez Busnel , les journaux spécialisés ( ou non )nous balancent leur top 10, leurs immanquables, leurs découvertes, leur Amélie Nothomb.( Il faudra quand même arrêter un jour avec ses chapeaux, ses champagnes, ses fans … )  

Et puis il y a Jean-Philippe Toussaint et moi, je m'incline . 

Qui est capable pendant 100 pages de vous parler Commission Européenne, bitcoin, haute technologie, sans que vous n'y compreniez rien de rien et que vous trouviez ça chiant et imbuvable ?

Qui après cette purge vous balancera une clé USB au pied du personnage principal ( et pour la première fois en quelques heures de lecture, je vous assure que vous allez cligner un peu des yeux et changer de position sur votre fauteuil )?

Qui ? Je vous le demande ? 

Un génie !

Il est là le livre de la rentrée. Il décode tout de notre société actuelle pour ne garder à la fin que la substantifique moelle de l'humanité . 

Vive Jean-Philippe Toussaint et ses bitcoins !

Mathieu Palain , la vie mode d'emploi.

Dans un roman ultra-réaliste, Mathieu Palain nous raconte la vie de Wilfried. Placé à l'âge de huit mois, ce gosse va être suivi par un service de la PJJ (protection judiciaire de la jeunesse) et nous allons le voir grandir dans une société qui ne lui laissera pas forcément beaucoup de choix pour s'en sortir. 

Un plaidoyer pour les éducateurs et les services de protection de l'enfance, souvent décriés ou mis au banc des accusés . Un bon premier roman .

" Le ghetto intérieur " ou le silence face à l indescriptible douleur.

On ne pourra pas dire que ce récit est un récit de plus sur la Shoah. On pourra juste dire que c'est un grand livre. Un qui doit rester, un  qui doit passer de mains en mains. La puissance des mots contre le silence face à l'inacceptable. 

Je n'ai jamais lu un témoignage aussi étouffant.  

Quand l'Europe se réveille petit à petit et à nouveau aux bruits des bottes de l'antisémitisme,  du racisme, et du rejet de l'étranger,  j'espère que ce livre contaminera le coeur de nombreuses personnes . Pour que jamais , on ne puisse revivre cet enfer-là.